Action en garantie des vices cachés : la Cour de cassation tranche en faveur d’un délai de prescription !
Publié le :
04/06/2024
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Les actions en justice sont encadrées par divers délais : forclusion ou prescription. La distinction est essentielle, bien qu’elles constituent toutes deux des fins de non-recevoir au sens de l’article 122 du Code de procédure civile. La forclusion est implacable, seule l’action en justice est susceptible d’en interrompre le délai, alors qualifié de préfix (article 2241 du Code civil). Le régime de la prescription est beaucoup plus souple, plusieurs évènements peuvent en suspendre, ou en interrompre le délai (articles 2233 et suivants du Code civil).
La Cour de cassation a été saisie le 21 juillet 2023 afin de trancher la question suivante : le délai biennal attaché à l’action en garantie des vices cachés est-il un délai de forclusion ou de prescription ?
Dans cette affaire, un producteur se fournit en poches de conditionnement auprès d’une autre société. Des clients invoquent un gonflement anormal du produit entraînant sa détérioration. Le producteur déclare le sinistre à son assureur, qui ordonne une expertise amiable, avant d’assigner, le 24 septembre 2013, le fournisseur et son assureur sur le fondement de la garantie des vices cachés.
Estimant la demande irrecevable, le fournisseur et son assureur soulèvent une fin de non-recevoir au regard de la forclusion de l’action en garantie des vices cachés. Selon eux, puisqu’il s’agit d’un délai de forclusion, la mesure d’expertise ne peut pas suspendre ce délai. Cette possibilité n’est ouverte qu’en cas de délai de prescription, conformément à l’article 2239 du Code civil.
Toutefois, la Cour d'appel de Nîmes estime que le délai de deux ans, attaché à l’action en garantie des vices cachés, est un délai de prescription pouvant être suspendu quand le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction. Le délai recommence à courir à compter du jour de l’exécution de cette mesure. Dès lors, l’action en justice intentée le 25 novembre 2015 est recevable, puisqu’elle l’a été moins de deux ans après la date du dépôt du rapport d’expertise, le 19 décembre 2013.
La Cour de cassation confirme cette analyse de la Cour d'appel. Afin de justifier sa décision, elle rappelle que le délai pour exercer une action en garantie des vices cachés est de 2 ans à compter de la découverte du vice (article 1648 du Code civil) et que, si l’article 1642-1 alinéa 2 du Code civil fait état d’un délai de forclusion, ce n’est pas le cas pour les vices cachés.
Cet arrêt de la Chambre Mixte vient trancher une différence d’appréciation entre d’une part la troisième chambre civile de la Cour de Cassation, qui optait pour un délai de forclusion et d’autre part, la première chambre civile et la chambre commerciale de la même Cour qui optaient pour un délai de prescription. Une telle opposition, notamment entre les deux chambres civiles, impactait fortement la sécurité juridique rendant nécessaire une telle intervention afin d’adopter une solution unique.
De nombreux rapports du Président de la République mentionnant un délai de prescription, ainsi que l’objectif de favoriser une réparation simple pour le consommateur, imposent un délai qui puisse être interrompu et suspendu.
C’est alors naturellement que la chambre mixte de la Cour de cassation énonce que « L'ensemble de ces considérations conduit la Cour à juger que le délai biennal prévu à l'article 1648, alinéa 1, du Code civil est un délai de prescription ». En l’espèce, la mise en œuvre de l’expertise judiciaire interrompant le délai de deux ans.
Référence de l’arrêt : Cass, chambre mixte, 21 juillet 2023, n°21-15.809
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